Auteurs : Nerea Larrañaga et Paula Marco
Des scientifiques de la Société internationale de la maladie de Parkinson et des troubles du mouvement (MDS) ont publié un article soulignant les principales priorités de la recherche sur la protéine α-synucléine (αSyn) dans la maladie de Parkinson. Cette étude, menée par une équipe internationale d'experts, se concentre sur les questions clés qui restent en suspens après plus de 25 ans de recherche sur cette protéine, dont l'agrégation est une caractéristique centrale de la maladie de Parkinson, à la fois sous sa forme sporadique et génétique (familiale ou héréditaire). Cependant, la compréhension de son rôle dans l'évolution et la pathogenèse de la maladie reste limitée.
L'importance de l'α-synucléine dans la maladie de Parkinson
L'αSyn est une petite protéine qui s'accumule dans les neurones des personnes atteintes de la maladie de Parkinson, formant des inclusions ou des amas connus sous le nom de corps de Lewy, qui sont considérés comme l'un des principaux marqueurs de la maladie, car il s'agit d'une caractéristique unique de la maladie. Bien que les mutations du gène SNCA (le gène à partir duquel l'αSyn est produite) et la duplication ou la triplication de ce gène soient associées à des cas familiaux de Parkinson, le rôle exact de l'αSyn dans le développement de la maladie n'est pas encore totalement compris. L'un des débats les plus importants est de savoir si l'accumulation d'αSyn est directement toxique pour les neurones ou s'il s'agit d'un effet secondaire d'autres processus pathologiques.
En conséquence, le comité scientifique du MDS a identifié six questions clés sur lesquelles la recherche devrait se concentrer.
- Quelles sont les fonctions physiologiques de l'α-synucléine ?
Il a été observé que la perte de fonction de l'α-synucléine, c'est-à-dire sa perte due à la formation d'amas comme chez les patients atteints de la maladie de Parkinson, ne provoque pas directement la neurodégénérescence, mais son accumulation anormale est liée à la détérioration des neurones. En outre, cette protéine est également impliquée dans la régulation de la libération des neurotransmetteurs, mais son rôle exact dans ce processus et la manière dont ses mutations contribuent à la maladie de Parkinson restent des aspects importants qui nécessitent des recherches plus approfondies.
Il est essentiel de comprendre la fonction normale et la régulation de l'α-synucléine dans son environnement, non seulement pour développer des thérapies qui réduisent la quantité d'αSyn totale ou favorisent l'αSyn physiologique par rapport à ses états altérés, mais aussi pour comprendre le contexte dans lequel la maladie se développe.
- Quels sont les mécanismes qui déclenchent l'agrégation de l'αSyn ?
Les chercheurs ne comprennent pas encore parfaitement les facteurs qui incitent l'αSyn à s'agglutiner et à former des corps de Lewy. Certaines théories suggèrent que l'accumulation de la protéine est liée à une mauvaise gestion du stress cellulaire (mécanismes par lesquels les cellules traitent les déchets générés par leur activité normale), à des altérations de la clairance des protéines ou à des interactions avec les lipides de la membrane cellulaire. En outre, nous étudions comment les facteurs génétiques et environnementaux interagissent pour faciliter l'accumulation de l'α-synucléine et sa conversion en formes toxiques qui endommagent les cellules.
- Quelle est la distribution de l'αSyn dans le cerveau ?
Bien que les corps de Lewy apparaissent dans des zones spécifiques du cerveau chez les personnes atteintes de la maladie de Parkinson, on ne sait pas exactement pourquoi certains neurones sont plus vulnérables que d'autres à cette pathologie. Il a été suggéré que la distribution de l'αSyn pourrait être liée à la connectivité neuronale et aux schémas d'activité dans certaines régions du cerveau. Les recherches futures devraient donc se concentrer sur une cartographie plus précise de ces connexions cérébrales et sur la manière dont les facteurs spécifiques aux neurones influencent la propagation et la toxicité des agrégats d'α-synucléine.
- Quel est le lien entre l'agrégation de l'αSyn et le dysfonctionnement neuronal ?
Il existe une forte corrélation entre l'agrégation de l'α-synucléine et la maladie de Parkinson, mais prouver un lien de causalité direct chez l'homme reste un défi, car l'un des grands mystères de la maladie reste la façon dont l'accumulation d'αSyn affecte la fonction neuronale. Il a été proposé que l'accumulation d'αSyn puisse altérer la libération de neurotransmetteurs et endommager les mitochondries, qui sont essentielles pour l'approvisionnement en énergie cellulaire, mais des travaux supplémentaires sont nécessaires pour comprendre comment les différentes conformations de la protéine affectent les neurones.
- Comment l'α-synucléine se propage-t-elle dans le cerveau ?
L'une des hypothèses les plus largement acceptées est que l'α-synucléine pathologique se comporte de la même manière qu'un prion, c'est-à-dire qu'elle peut se propager de cellule en cellule en induisant sa structure anormale à d'autres α-synucléines physiologiques, ce qui accélère la propagation de la pathologie à différentes zones du cerveau. Cependant, il est urgent de développer des biomarqueurs fiables capables de détecter et de quantifier l'α-synucléine pathologique chez des patients vivants, ce qui permettrait un suivi plus précis de la progression de la maladie et de l'efficacité des thérapies.
- Est-il possible de sauver les neurones affectés ?
Enfin, les experts se demandent s'il est possible d'intervenir pour sauver les neurones qui ont accumulé de l'αSyn avant qu'ils ne meurent. Certaines régions du cerveau semblent capables de supporter des charges élevées d'αSyn sans subir de dégénérescence, et tous les agrégats d'α-synucléine n'ont pas la même toxicité, ce qui ouvre la possibilité que certaines interventions puissent protéger les cellules cérébrales affectées ou cibler spécifiquement les formes altérées les plus nocives de la protéine.
L'avenir de la recherche et les percées thérapeutiques potentielles
L'un des principaux objectifs de l'équipe d'experts est de développer de meilleurs modèles expérimentaux capables de reproduire les différents stades de la maladie, depuis l'accumulation précoce d'αSyn jusqu'au dysfonctionnement neuronal avancé. Les scientifiques proposent de créer de nouveaux outils pour étudier l'αSyn sous ses différentes formes (soluble, agrégée et oligomérique) afin de mieux comprendre comment elle interagit avec d'autres composants cellulaires et comment cela conduit à un dysfonctionnement neuronal.
Les progrès technologiques, tels que les modèles de culture de cellules cérébrales humaines et l'application de nouvelles techniques d'imagerie pour étudier la propagation de l'αSyn dans le cerveau, peuvent offrir de nouvelles approches pour étudier la pathogenèse de la maladie de Parkinson et concevoir des interventions thérapeutiques. En outre, les études qui intègrent les données de ces modèles avec des informations provenant d'études cliniques permettront de mieux comprendre comment la maladie commence et évolue chez l'homme.
Conclusion
Le document souligne qu'une meilleure compréhension de l'αSyn et de son rôle dans le développement de la maladie est essentielle pour faire progresser le développement de traitements visant à modifier la progression de la maladie de Parkinson. Grâce à de nouvelles recherches répondant aux questions clés soulevées par le groupe d'experts, les scientifiques espèrent concevoir des thérapies capables de ralentir, voire d'inverser la progression de la maladie de Parkinson. Cette approche promet de faire la lumière sur l'une des maladies neurodégénératives les plus répandues et les plus dévastatrices au monde, ouvrant la voie à des traitements plus efficaces à l'avenir.